Postée devant sa boite aux lettres Carolane ouvrit son courrier en vérifiant qu’elle ne serait pas en retard pour son rendez-vous shopping avec Sperenza. Une enveloppe en particulier attirait son attention comme elle portait le cachet du tribunal. Cela signifiait très rarement une bonne nouvelle. Son cœur battant la chamade alors que ses doigts glissaient lentement sur le papier pour découvrir quelle mauvaise surprise l’attendait à l’intérieur. Et lorsque la jeune femme décrypta les mots qui s’étalaient dessus il cesse de battre pendant une seconde. Ce n’était pas possible on ne pouvait pas lui faire cela. L’étudiante eu presque envie de pleurer alors que les images de son passé envahissaient son esprit. Pourquoi mais pourquoi elle ?! Adi avait eu être une sacrée garce dans une vie antérieur pour que la vie se venge à ce point maintenant. Déglutissant difficilement, la brunette rangea le tout n’importe comment dans son sac à main trop grand et sortie en échange ses clés de voitures. Elle se dirigea ensuite vers son véhicule et s’assit derrière le volant. Caro prit un moment pour reprendre sa respiration et chasser ses idées noires. Dans le rétroviseur elle vérifia son maquillage, se remit un peu de gloss pour tenter de se donner du courage, comme si se faire belle pouvait lui accorder cela. Puis elle mit le moteur en route et prit le chemin du centre-ville.

Trouver une place pour se garer ne fut pas une mince affaire mais cela permit en fin de compte à la jeune femme de gagner du temps pour se calmer et affronter la bonne humeur de sa meilleure amie. Faire les magasins et dépenser son argent seraient des plus thérapeutiques, Assy n’en doutait pas. Elle se regarda une ultime fois dans le miroir, placarder son célèbre sourire sur ses délicieuses lèvres et sortie de sa voiture prête à faire disparaître l’information qui trainait dans son fourre-tout de son cerveau. Il lui fallut faire quelque pas pour se retrouver devant une de ses boutiques favorites en ville. Carolane y trouvait toujours quelque chose, dénichant la perle rare de la semaine dans le nouvel arrivage ou au contraire dans ce qui allait bientôt disparaître des rayons. Se réjouissant à l’avance des merveilles qui se trouvaient à l’intérieur, la brune resta devant à attendre sa sœur de cœur.

Dans sa précipitation à quitter sa maison, Adina était arrivée plus tôt qu’elle ne le pensait et aurait donc pu tourner encore un moment pour se garer peut-être plus près des magasins mais elle s’en fichait. Marcher, prendre l’air était bon pour son moral. L’étudiante n’en revenait toujours pas de ce qu’elle avait lu. Cela n’avait aucun sens car le jugement avait pourtant stipulé que les dix années étaient incompressibles pas de remise de peine pas de rien tout ! Alors comment ? Complètement dépassée par les évènements la demoiselle chassa une nouvelle fois les affreux souvenirs qui l’assaillaient de son esprit, elle ne voulait plus penser à cette époque, à cette fameuse nuit qui lui avait tant couté, qui avait fait changer à jamais le cours de sa vie. Instinctivement la belle passa une main sur son ventre et pensa que six année plus tard cela lui faisait toujours aussi mal. Sa vie aurait pu être tellement différente de ce qu’elle était en cet instant. Une voix résonna tout près de Caro et cette dernière sursauta presque tant elle était perdue dans son monde ténébreux.

Journée shopping avec Carolane. Le meilleur moyen pour oublier. Enfin, essayer au moins. Je me prépare, Ermès me taquine, me demandant ce qu'on va bien se raconter lors de cette journée entre filles. Il essaie même de s'incruster. Seulement il est hors de question je le pousse finalement sur le lit, lui disant qu'il ferait mieux d'aller soigner les malades de Vérone au lieu de m'embêter. Après avoir échangé un bref baiser avec mon fiancé, je m'en vais direction ma boutique de fringues préférée. Musique à fond dans la voiture, je me rends compte que j'ai bien besoin de ça. Depuis la mort de Vito j'ai l'impression que ma vie n'est plus qu'un grand n'importe quoi. Certes ça a toujours été plus au moins le cas. Mais au moins j'avais le contrôle sur celle-ci. Aujourd'hui je suis perdue. Tiraillée entre deux hommes, entre deux amours. Tandis que mon coeur pleure la mort de ma moitié, mon jumeau. Alors oui j'ai besoin de cette sortie. M'amuser, critiquer et torturer en compagnie de Carolane, mon amie de toujours. De plus j'y pense de plus en plus et j'ai l'impression qu'il va bien falloir que je finisse par lui parler. Angelo, Ermès, tout ça, il faut qu'elle sache, j'ai besoin de ses conseils. Seulement j'ai peur qu'elle le prenne mal étant amie avec Ermès et surtout vouant une haine pour les Capulet, surtout depuis Mattis. C'est ça qui m'a fait reculer tant de fois. Car oui maintes fois j'ai essayé de lui en parler, de lui expliquer, de chercher réconfort et conseil auprès de ma meilleure amie, ma soeur. Mais ayant bien trop peur qu'elle ne l'accepte pas, qu'elle n'essaie pas de comprendre, j'ai chaque fois reculé, abandonné. Étonnant de ma part. Seulement depuis que j'ai perdu Vito, j'ai bien plus peur de perdre Caro. Car je sais que sans elle, j'aurais du mal à avancer. Me rendant alors compte qu'une fois encore mes problème me tourmentent, j'augmente le son de la musique afin de stopper tout ce vacarme dans ma tête. En vain. Car mes sombres pensées restent malgré tout dans un coin.

Et finalement lorsque j'arrive enfin à la boutique, j'ai le moral dans les chaussettes. Je n'aime pas ça. Absolument pas. Si bien que j'essaie durant quelques secondes de me rebooster. Une fois mon coeur battant moins fort, je m'empare de mon sac, sort de la voiture, la ferme puis me dirige vers l'entrée. Au loin j'aperçois Caro, j'me demande alors si comme d'hab j'suis en retard, je regarde l'heure et m'aperçois que non, pour une fois je suis pile à l'heure. Arrivée à ses côtés je lui lance alors d'un ton un peu trop enjoué « Alors beauté, depuis quand es-tu en avance ? Tu as de la chance pour une fois je suis dans les temps. Bien que comme d'hab Ermès m'a taquiné voulant à tout prix venir ou au moins savoir ce que nous allons nous dire. Je lui ai promis de lui faire un résumé ce soir, mais bon je l'occuperais à ma manière ppour préserver nos secrets. » Et en plus de ça je parle trop. C'est quelque chose qui m'arrive souvent lorsque je suis stressée. Et là, bien qu'il n'y a pas lieu de l'être, je le suis. Le moral que j'veux à tout prix cacher à Caro. Le sujet Angelo que j'aimerais enfin aborder. Bref tous ces trucs qui font que ça pourrait gâcher notre journée bien que ce soit tout ce que j'aimerais éviter. J'm'avance alors vers elle, essayant de me décontracter et le sourire aux lèvres je lui dépose une bise sur la joue. « On y va ? J'ai une folle envie de cappucino ! » Je la prends par le bras, nous rentrons dans le bâtiment et je continue de parler encore et encore... « La semaine dernière j'ai vu une robe : MA-GNI-FI-QUE ! Il faut absolument que je l'essaie et que tu me dises si elle me va. C'est au deuxième étage. » Très vite on m'amène un cappucino. On me connait ici et j'y ai mes habitudes. Les hôtesses savent que je suis une cliente intransigeante, encore plus lorsque Caro est à ma présence. Je remercie d'un sourire la demoiselle qui m'a servit et j'amène Caro à l'étage. « Tu ne sais pas ? Shakespearette a encore posté un ragot que j'ai fait tourner. Lorsqu'elle saura que ce n'était qu'une pure invention de ma part, elle va être encore une fois folle de rage. » Je ris et une fois la fameuse robe trouvée j'me dirige vers les cabines d'essayage traînant toujours Caro à mon bras. Je pose mon cappuccino sur la table, entre dans ma cabine préférée : la 27ème et alors que j'essaie la robe je crie « Et sinon comment va ma meilleure amie préférée ? »

Cette voix Calorane la connaissait depuis toujours et elle plaça donc un sourire rayonnant en se tournant vers sa meilleure amie. Elle qui était toujours en retard était aujourd’hui pile à l’heure, cela faisait plaisir de ne pas avoir à l’attendre pendant des heures sans fin et à ruminer durant tout ce temps. Elle écouta la brunette débitée à propos de son début de journée et dû retenir une grimace de dégout quant à ce que Sperenza pourrait faire pour distraire Ermès, elle imaginait même très bien et cela lui fendait le cœur. Comment pouvait-elle aimer et détester sa sœur à ce point. Tout ça parce qu’elles aimaient le même homme, bien Ad ignore ce dernier détail et que Caro comptait bien garder pour elle, probablement jusqu’à la mort. De toute façon elle avait bien plus dévastateur à faire pour aujourd’hui. Enfin si la jeune femme se décidait, l’information était encore trop fraiche dans son cerveau pour pouvoir en parler. Le dire rendait la chose trop vraie, et cela elle ne pouvait pas encore le digérer. Sans rien rajouter elle se laisse entrainer dans le magasin à la suite de son amie et de la bonne humeur débordante de celle-ci. Ce qui lui paraissait étrange d’ailleurs la demoiselle était du genre enthousiaste mais quand cela tombait dans l’excès, il y avait anguille sous roche. Etrange. Qu’est-ce qu’il pourrait bien ne pas tourner rond dans le petit monde parfait de Sperenza. D’accord ce n’était pas juste de dire ça mais Assy ne contrôlait pas sa jalousie. Un homme qui vous aime, un mariage en préparation, que pouvait-on demander de plus ? Elle, elle n’aurait probablement jamais rien de semblable.

Dans la boutique on servit très rapidement un Latte à la publiciste qui avait ses habitudes ici au même titre que Spe, bien que cela devait être pire pour elle vu les sommes folles qu’elle pouvait y dépenser. Enfin Adina ne se privait pas non plus pour larguer son argent durement gagné dans les caisses du Tunica. « Dis donc t’es en forme toi aujourd’hui ! » Constata Caro en rigolant, alors qu’elle la suivait à l’étage pour voir la fameuse robe. Cela ne l’étonnait même pas mais expliquait le lieu du rendez-vous, en plus la brunette avait repérer tout de suite en rentrant la vendeuse qu’elle et Spe adorait torturer en l’envoyer dans tous les coins du magasin afin de trouver des articles impossibles ou des tailles inexistantes. Cela appartenait à la catégorie des petits plaisirs de la vie. Quand est-ce que les deux gamines de l’époque avaient-elles commencé à faire des misères à leur entourage ? Carolane n’aurait su le dire mais cela lui procurait toujours autant de plaisir. C’était surement son mauvais karma qui était responsable de la nouvelle qui dormait dans son sac à main, se dit-elle mais non pas tout à fait. Sa meilleure amie faisait la même chose et continuait en envoyant n’importe quoi au site de rumeur de la ville et pourtant tout lui réussissait à elle. Si on oubliait la mort de son frère bien évidemment. Adina eut d’ailleurs un pincement au cœur en pensant à Vito et en suite logique elle pensa à son propre frère disparu tragiquement. Une des pierres angulaires de son passé douloureux. Sans cela peut-être qu’il avait tant de chose qu’elle aurait fait différemment. Mais comme le disait le dicton avec des si on mettrait Paris en bouteille.

Postée devant la cabine, Adi sirotait son café alors qu’à l’intérieur sa sœur de cœur essayait sa nouvelle tenue. Mais rien qu’à la couleur la jeune femme savait qu’elle allait décevoir Spe. Celle-ci lui demanda comment elle allait et la brunette contempla la possibilité de dire la vérité, ce qu’elle lui annoncerait et comment ou bien elle pouvait aussi ne rien dire. Et bizarrement cette option lui plaisait nettement plus. Pourquoi ? Pour ne pas avoir à subir une quelconque pitié, parce que le lieu ne se prêtait pas à cette confidence. Ou encore une fois parce qu’elle-même n’était pas encore prête à se l’entendre dire. Cette lettre était autant de coup de poing qu’il lui avait au court de cette affreuse nuit. Prenant encore une gorgée de sa boisson chaude elle répondit en se maudissant pour ce mensonge.

« Ma foi ça va bien la routine quoi. Mon patron est toujours aussi chiant, mais il part en Sicile la semaine prochaine alors je serai tranquille. Mes parents sont toujours aussi relou mais le nouveau prête est tellement mignon que je n’ai pas rechigné à aller à la messe dimanche dernier et le prochain non plus ! »

Elle éclate de rire en pensant à cette situation. Elle exagérait un peu car il n’était pas si beau que cela mais au moins ça changeait de celui tout rabougris d’avant. Carolane s’interrogea sur le bénéfice d’une confession. Elle n’était pas croyante loin de là, si la belle continuait d’accompagner ses parents à l’Eglise c’était principalement pour leur faire plaisir et ne pas avoir à faire à manger le midi et pouvoir emporter les restes pour le diner. Bien souvent elle finissait sa nuit sur les bancs en bois et jouait avec son portable. Mais avec ce qui lui tombait dessus pourquoi pas.

J'étais faussement de bonne humeur. Ce truc d'avancer à cent à l'heure quand plus rien ne semble aller c'est mon truc. Je sais pourtant que la meilleure solution serait de tout dire à ma meilleure amie et pourtant je n'arrive jamais à m'y résoudre. Sans doute est-ce la peur de la perdre. De perdre à nouveau quelqu'un qui m'est chère. J'enfile donc cette robe l'écoutant avec une attention qui ne m'est pas familière. On dit souvent de moi que je suis une fille superficielle, une fille qui ne prête attention à rien si ce n'est sa petite personne... Et pourtant, malgré les apparences, je suis plus qu'attentive à ceux qui m'entourent, à ceux que j'aime surtout. Dont Carolane. Alors lorsqu'elle lance « Ma foi ça va bien la routine quoi. Mon patron est toujours aussi chiant, mais il part en Sicile la semaine prochaine alors je serai tranquille. Mes parents sont toujours aussi relou mais le nouveau prête est tellement mignon que je n’ai pas rechigné à aller à la messe dimanche dernier et le prochain non plus ! » je me pose alors des questions. Une sensation désagréable s'empare de moi. Comme si il y avait quelque chose dans la voix de ma Vesari adorée qui sonnait faux avec ce qu'elle pouvait dire. Quoiqu'en dise les gens, nous sommes toutes les deux bien plus que deux pestes s'amusant à traumatiser les gens qui se trouvent sur notre chemin. Je la connais quasi par coeur et ce que je perçois au delà de ce qu'elle peut me dire ne me plait pas... Oui je connais très bien Caro et lorsque ça ne va pas, lorsque quelque chose la chagrine ou la tourmente, je sais que ce n'est certaine pas une futilité. Cependant je suis son amie, sa meilleure amie et c'est sans doute pour cela que je ne la force pas à en dire plus, à me parler. Non j'ajuste juste la robe sur laquelle j'ai flashé quelques jours auparavant et sors de la cabine tandis que je la regarde le coeur serré entrain de rire alors qu'elle n'en a pourtant pas le coeur. Je me joins malgré tout à elle, faussement aussi et lui réponds « Coquine va ! Tu sais que tu deviens pire que moi Caro ? Tu fantasmes même sur les hommes de Dieu... Moi ça ne m'est jamais arrivé... » Menteuse que je suis, j'me souviens avoir tout fait pour me taper un jeune prêtre alors que j'avais à peine quinze ans. Le pauvre a changé d'église et moi j'me suis faite sermonner durant des heures par mon beau-père parce que ça avait bien fait jaser les Capulet... Mais c'était marrant, c'était comme si il avait accroché sur lui un panneau "interdit" et pour la gamine rebelle que j'étais c'était un joli défi. Je comprends donc pourquoi tout cela amuse Caro après tout elle n'a jamais eu de chance dans sa vie "amoureuse". Un prêtre c'est sur que ça fait moins peur qu'un salop de Capulet. En pensant à Matteo, j'ai le coeur qui se resserre, je repense à l'état dans lequel Caro était et surtout le temps qu'elle a mis pour se remettre de tout ça. Heureusement aujourd'hui même si rien n'est officiel entre eux parce que ma meilleure amie ne semble pas prête à sauter le pas je suis heureuse de savoir que Milo est là pour elle. C'est un bon gars et en plus de cela plutôt sexy. Il me fera de beaux filleuls. Un sourire s'affiche sur mes lèvres en pensant à l'avenir qui s'offre à ma meilleure amie. C'est tout ce que je lui souhaite. Après tout si moi je ne semble pas pouvoir être heureuse en amour et avoir en même temps la vie rangée avec un homme et des enfants que j'ai toujours souhaité un jour avoir, j'espère que ma meilleure amie l'aura. C'est en repensant une nouvelle fois à Diamante et au pétrin dans lequel je suis que je me dirige vers un des nombreux miroirs de l'espace d'essayage. Je fais la moue pas tant convaincue par la robe puis me retourne vers Caro pour avoir confirmation « Finalement ce n'est pas top n'est ce pas ? J'ai l'impression qu'elle ne me met pas en valeur t'en penses quoi ? »

Carolane aimait entendre le rire que sa meilleure amie, elle pouvait tout y lire et ce qu’elle entendait ne lui plaisait pas trop. Elle se forçait et il n’y avait pas cet éclat qu’elle adorait tant et illuminait son monde. La jeune femme n’avait pas peur de parler en ces termes de Sperenza, en un sens elle l’aimait comme on aime un amant, comme de la famille mais d’une façon un peu plus intense, sensiblement différente. Elles se connaissaient depuis si longtemps, qu’elles se connaissaient par cœur et Adina savait qu’elle ne cacherait pas des heures durant son trouble à celle qui était sa sœur de cœur. Oui, on pouvait dire qu’elle était aussi amoureuse d’elle, sauf qu’il n’y avait aucune question de sexe entres les deux amies. C’était aussi cela qui rendait si dur de la voir vivre le grand amour avec Ermès. Elle les aimait tant l’un et l’autre que de les voir vivre quelque chose de leur côté, sans elle, d’expérience de nouvelles choses ensemble, la rendait jalouse. Mais Spe méritait aussi sa part de bonheur. La dernière année regorgeait de mauvais souvenir, tout comme son enfance. Si seulement elle avait pu le trouver dans les bras d’un autre, la pilule serait un peu mieux passer. Même si c’était une pensée égoïste, elle soulagea son cœur pendant une microseconde. Elle reporta ensuite son attention sur ce que lui disait la jeune femme en plein essayage. Oui il fallait être très portée sur le sexe pour s’intéresser à un homme ayant fait vœu de chasteté. Ou alors tout aussi désespérée que l’était Assy en ce moment. Il y avait bien ce garçon Milo qu’elle fréquentait amicalement, allant jusqu’à un ou deux baisers mais pour elle ce n’était pas sérieux, ça ne pouvait pas l’être. Elle roula cependant des yeux lorsque son amie précisa qu’elle ne s’abaisserait jamais à ça. Ce qui était faux mais Caro ne dit rien.

Elle reprend un peu de café et observe Sperenza qui semble se rendre compte que cette robe ne lui va pas. La publiciste n’avait pas osé le dire, pour ne pas la froisser, mais son regard devait la trahir, ainsi que son absence de tout compliment. Elle tapote le rebord de son gobelet avec ses doigts en se demandant comment tourner sa phrase pour ne pas la vexée, encore qu’elle savait que rien de ce qu’elle dirait ne serait pas bien pris. Leur complicité allait bien au-dessus des remarques ou des jugements de valeurs. Caro fit un signe à la vendeuse pour l’envoyer ailleurs et les laisser seules. Elle posa ensuite sa boisson par terre pour s’approcher de sa sœur et défaire la robe avec délicatesse.

« Je pense que tu dois avoir la tête ailleurs pour flasher sur une robe qui qui n’est pas dans tes couleurs. Et aussi parce que tu n’es jamais à l’heure sauf quand tu fuies quelque chose… Elle marque une pause et lui envoie un sourire à travers le miroir. Tu veux m’en parler ? »

C’était un petit peu l’hôpital qui se moque de la charité quand on savait que normalement Adi était celle qui avait quelque chose sur le cœur, qui n’était pas bien. Mais elle préférait soulager son ami qu’elle-même. Un moyen de compenser son égoïsme de tout à l’heure. Elle aussi avait perdu son frère mais ce n’était pas son jumeau, leur lien n’avait rien de comparable avec celui que Spe et Vito entretenait. Il lui faudrait surement plus qu’une petite année pour se remettre d’une telle perte. Enfin, Caro imaginait que c’était cela qui rendait sa compagne triste et un peu tête en l’air. S’il y avait autre chose, elle le saurait, sa meilleure amie ne pouvait pas avoir de secret pour elle, impossible. Et pourtant, Adi lui cachait beaucoup de trucs elle. Enfin elle avait bien l’intention de tout lui avouer un jour, a un détail près concernant son fiancé. Il fallait juste que le moment soit le bon, que l’opportunité se présente. Oui la brunette finirait par ouvrir son cœur à celle qui était sa meilleure amie, une fois que cette dernière aurait l’esprit plus léger pour encaisser la nouvelle de la libération de Matteo. Pour l’instant, la principale concernée avait encore du mal à digérer ça alors elle ne pouvait pas en parler tout de suite.

Je me regarde, en faisant la moue. Comment ais-je bien pu craquer sur une telle robe ? Habituellement en un regard je sais si oui, ou non, un vêtement m'ira. J'arrive même à le faire avec mes amies... Mais là, non. Je suis passée complètement à côté. Etait-ce parce que le jour où je suis tombée sur cette robe je pensais au baiser de la veille avec Diamante ? Sans aucun doute. Je vois que ma meilleure amie n'ajoute rien et comprends très vite que j'ai faillit faire là, une grave faute vestimentaire. Heureusement Caro et moi y avons remédié avant qu'il ne soit trop tard. Je regarde d'un oeil lointain mais d'expert les rayons. Je veux me trouver quelque chose. Le moral est au plus bas, hors de question que je parte sans m'acheter au moins un petit truc... Alors que ma brunette préférée fait signe à la vendeuse qui nous colle aux basques depuis que nous sommes arrivées, sachant que nous sommes de très bonnes clients, elle s'approche ensuite de moi et commence à défaire les liens de cette affreuse robe. Ce qui est bien avec Caro, c'est que j'ai même plus besoin de dire les choses, directement elle les ressent. Ce qui est bien. Enfin... C'est vite dit. Car dans les moments comme celui-ci, où je ne veux pas lui révéler les choses, du moins pas maintenant, tout de suite. C'est agaçant. Car oui je suis agacée qu'elle me connaisse si bien lorsqu'elle me demande si je veux lui parler de "la chose" qui fait que j'ai la tête ailleurs.

Je fais de nouveau la moue. Ai-je envie de lui en parler ? Et comment ! Cependant je ne sais pas comment aborder le sujet... C'est trop compliqué de dire à sa meilleure amie qu'on pense être amoureuse d'une femme, qui plus est d'une Capulet alors qu'on est fiancée à son meilleur ami. Malgré tout, je me jette à l'eau. J'peux pas garder ça plus longtemps pour moi. Même si je ne lui ment pas au sens littéral des choses, le fait de les lui dissimuler me donne l'impression de mentir à celle que je considère comme ma moitié, ma soeur. « Eh bien il y a effectivement quelque chose... » Je me pince les lèvres avant de reprendre. « Il y a quelques temps j'ai rencontré quelqu'un. Cette personne est devenue petit à petit plus importante dans ma vie. » Je tate un peu le terrain ayant bien trop peur de la réaction de Caro, parfois elle peut avoir des réactions... dignes de Carolane quoi. Et même si c'est ma meilleure amie et que je sais pouvoir compter sur elle, j'ai peur. Peur parce que je ne suis pas prête à assumer tout ce qu'il se passe dans ma vie, dans ma tête et surtout dans mon coeur. « Bref. Du coup j'commence à me demander si Ermès est vraiment l'homme qu'il me faut... » A travers le miroir, j'essaie de distinguer sa réaction... « Je l'aime pourtant... Mais j'sais pas... C'est compliqué. » Les liens défaits de la robe, je me tourne alors vers mon amie scrutant ses traits, son regard afin de savoir quelle sera sa réaction... Et même si elle a l'air surtout complètement choquée, j'ai l'impression que Carolane va m'incendier... Finalement ce n'était peut-être pas une si bonne idée de discuter de moi. Alors afin d'essayer de sauver les meubles je la coupe dans son élan et lance « Mais toi aussi t'as l'air mal ! Qu'est-ce que tu as ? » Certes comme ça, ça pourrait avoir l'air plus d'une tentative "noyade de poisson" cependant je m'intéresse vraiment à Caro et le fait qu'elle ne semble elle non plus, pas dans son assiette me préoccupe malgré mes soucis. Car après tout, aussi égoïste suis-je, Caro est l'une des rares personnes qui parfois passent avant moi.

Carolane se mordit presque les doigts d’avoir poser sa question. Pourtant c’était assez innocent comme geste, elle souhaitait juste aider son amie, la réconforter. Mais ça c’était quand la brunette pensait que sa compagne se sentait mal par rapport à la mort de son frère jumeaux. Là, la jeune femme n’était pas sûre de comprendre. Sperenza avait rencontré quelqu’un, jusque là, ce n’était pas problématique. Mais que cette personne prenne autant d’importance pour la faire douter de son amour pour Ermès, mais sa sœur de cœur devait être tombée sur la tête ! La publiciste aurait tout donné dans la vie pour avoir ne serait-ce que la chance que son meilleur ami la remarque, la regarde comme une femme, et pas comme une gamine. Et Spe qui l’avait au creux de sa main, qui avait réussi à se faire passer la bague au doigt et préparait son mariage doutait ! Mais c’était hallucinant, surnaturel et impossible. Personne ne pouvait égaler l’homme qui avait volé le cœur d’Adina depuis tant d’année, alors le surpasser, c’était véritablement impensable. Cependant la demoiselle fit de son mieux pour se contrôler, elle n’allait pas dire tout cela cash à son interlocutrice et il fallait aussi qu’elle fasse attention à son langage corporel. L’étonnement oui, le reste à bannir. Elle se contenta donc d’acquiescer doucement de la tête, comme si elle ne jugeait pas son amie. Déjà parce qu’elles étaient au dessus de ça depuis le temps qu’elles se connaissaient, et puis ensuite dans l’emportement, Assy risquait de balancer des choses qu’elle regretterait ensuite. Elle s’écarta simplement, et puis commença à réfléchir à ce qu’elle pourrait dire, mais la future mariée décida de se raccrocher aux branches en détournant la conversation. Chose que Spe faisait toujours avec brio, mais cette fois elle ne s’en sortirait pas si facilement. D’autant que la stagiaire n’avait pas l’intention de cracher son morceau à elle sur ce qui la chagrinait en ce moment et lui bouffait l’existence.

« Rien de particulier, juste le boulot qui n’avance pas comme je t’ai dis, et même si je suis contente de le faire, ça reste dur et épuisant mentalement. Et j’ai toujours ma mère qui me rabâche les oreilles qui moi je ne suis pas sur le point de me marier… »

Caro laissa sciemment sa phrase en suspend pour pouvoir revenir sur la fameuse personne qui hantait le cœur de sa sœur. C’était trop gros comme nouvelle pour l’enterrer aussi vite. Elle recula aussi pour que la jeune femme puisse se rhabiller, espérant qu’elles allaient quitter la boutique ou quoi et parler plus tranquillement. Elle aussi savait écarter les conversations qui ne lui plaisaient pas et puis elle ne lâcherait pas le morceau avant d’en savoir plus sur cette personne et ce que cela représentait vraiment pour sa meilleure amie. A côté sa peur et son mal être dû à la libération de son ex ne valait rien.

« Spe…je ne sais même pas quoi dire mais si tu doute est-ce que tu ne devrais pas repousser votre mariage, mettre un frein à tout ça.. ? »

Une partie de la jeune femme était on ne peut plus heureuse de penser à cela voir à une annulation, cela pouvait être la brèche, sa chance de se rapprocher d’Ermès mais d’un autre côté cela la désolait. Caro avait réussi à faire la paix et à se réjouir pour ses amis, pour leur bonheur et espérait trouver le sien un jour même si c’était ave un autre homme. Le retour de Matteo secouait un peu tout cela mais l’espoir n’était pas perdu. Cependant entendre tout cela lui laissait voir un avenir tout autre. Un avenir où Adi ne serait pas la troisième roue du carrosse. Et c’était moins culpabilisant si Sperenza décidait qu’elle était plus heureuse avec un autre homme. Parce que dans le cas contraire la jeune femme ne tenterait jamais quoi que ce soit qui puisse mettre le couple de ses amis en péril.